L'entreprise de Mei Lum a 100 ans de plus qu'elle. « Wing on Wo est dans ma famille depuis 1890 », explique la propriétaire qui représente fièrement la 5e génération, dont la boutique a commencé comme un magasin général, dans Chinatown tout juste émergeant à New York. « Ils vendaient des spécialités chinoises, une petite collection d'objets en porcelaine, et faisaient également office de service de poste informel aux personnes effectuant des allers-retours entre le sud de la Chine et New York. » En 1925, la boutique a déménagé pour s'établir au 26 Mott Street, où elle se trouve encore aujourd'hui, en intégrant à son équipe un herboriste ainsi qu'une rôtissoire, avant de finalement choisir de se concentrer sur la porcelaine peinte traditionnelle en 1964. C'est à cette date que la grand-mère de Mei, Po (photo ci-dessus), devint propriétaire de la boutique, poste qu'elle tiendra jusqu'à il y a 6 ans, avant de passer le relai à Mei, alors tout juste âgée de 26 ans.
Rapidement, Mei développa l'entreprise en ligne, créa de fortes relations avec d'autres entreprises dirigées par des femmes du quartier, et explora même des opportunités de vente en gros, ce qui est plutôt impressionnant de la part d'une personne ayant affirmé ne jamais avoir envisagé de gérer la boutique. C'est également elle qui est à l'initiative de The W.O.W. Project, un organisme à but non lucratif dont l'objectif est de résister au déplacement et à la gentrification qui touchent Chinatown au travers de l'art et du militantisme, et ainsi offrir un avenir plus accueillant pour les femmes, les queers et les jeunes transsexuels. Des rassemblements dans la boutique aux peintures murales pleines de vie, Mei confie que le travail réalisé par The W.O.W. Project fait honneur au rôle originel de Wing on Wo en tant que lieu de rassemblement communautaire. Et ce n'est que le début. « Nous voulons encourager les personnes à exprimer leur ressenti quant à la façon dont une devanture peut contribuer à un quartier », explique-t-elle.
Malgré les changements, Wing on Wo reste une affaire familiale multigénérationnelle. « Ma grand-mère, mon grand-père et ma grand-tante viennent au magasin tous les jours », raconte-t-elle. Sa grand-mère l'aide même avec les réseaux sociaux en générant de plus en plus d'abonnés grâce à une série Instagram inspirée de la chaîne QVC « Po's Picks » (La sélection de Po), dans laquelle elle présente plusieurs articles de la boutique. « Cela lui permet d'avoir un rôle dans notre présence numérique », confie Mei en souriant. « C'est un peu notre pro du marketing de 90 ans. »
Nous avons échangé avec Mei concernant ses sentiments liés au fait de reprendre une entreprise séculaire, sur la façon dont l'art peut contribuer au changement, et sur ses espoirs pour le futur de Chinatown.